Au quatrième jour du procès des attentats du 13 novembre 2015, le président de la cour d’assises a levé lundi les doutes qui pesaient jusque-là sur la diffusion d'enregistrements sonores captés au Bataclan. Des documents susceptibles de heurter la sensibilité des victimes et de leurs proches.
Faut-il diffuser l'ensemble des enregistrements des attaques du 13-Novembre ? Lundi 13 septembre, au quatrième jour du procès des attentats qui ont fait 130 morts et des centaines de blessés à Paris et Saint-Denis, le président de la cour d'assises de Paris a tranché : les photographies, vidéos et enregistrements sonores inhérents aux attaques et versés au dossier, seront retransmis lors des prochaines audiences.
À la demande d'associations de victimes, Jean-Louis Périès a aussi indiqué les dates auxquelles les documents susceptibles de choquer les familles, les victimes ou les personnes sensibles seront bien présentés. Ainsi les audiences des 16, 17, 20 et 21 septembre contiendront des enregistrements bruts.
Il y aura à partir du 16 septembre des "constatations des images des scènes de crime du Stade de France". Vendredi 17 septembre, il y aura "des présentations photos, vidéos concernant les faits commis au Bataclan et une partie de l'enregistrement sonore effectué au Bataclan. Je le dis aussi pour les parties civiles qui suivent par l'intermédiaire de la webradio, a ainsi précisé le juge. Pour que ces personnes prennent leurs dispositions".
Détonation des kalachnikovs et cris d'horreur
Des détonations de kalachnikov, des hurlements de spectateurs, les voix des terroristes et leurs revendications, l'explosion de la ceinture d'un kamikaze, l'arrivée des policiers... Ces scènes d'horreur ont été captées sur le dictaphone d'un technicien présent le soir du 13 novembre 2015, dans la salle de spectacles du Bataclan, lors du concert des Eagles of Death Metal. Ce document sonore de 2 heures, 38 minutes et 44 secondes, qui fait partie désormais des pièces à conviction saisies et à disposition de la justice, sera au moins en partie diffusé.
Le président a également indiqué que "des photos et vidéos du Comptoir Voltaire, de la Casa Nostra et de la Belle Équipe" seront également diffusées le 20 septembre. "C'est une très bonne chose que les dates de diffusion des documents sensibles aient pu être communiquées, se réjouit Marie-Claude Desjeux, présidente de la Fédération nationale des victimes d'attentats et d'accidents collectifs (Fenvac), dans un entretien à France 24. C'était une grande question que nous avons eu pendant toute la durée de la préparation du procès avec les victimes. Le fait d'annoncer le calendrier de ces diffusions permettra ainsi aux familles d'assister ou non à l'audience. Car ces moments sont très difficiles pour elles. Certains ont confié vouloir y assister, d'autres ne veulent rien entendre. Il y a un très large éventail des réactions et c'est bien que chacun puisse être libre de choisir".
"Je veux tout savoir"
Car la question fait débat. Le Parquet national antiterroriste a émis de son côté un avis non favorable en ce qui concerne la diffusion des enregistrements bruts. "Il n'est nul besoin d'écouter les cris d'horreur et les coups de feu pour comprendre ce qu'elles ont vécu", a tempêté de son côté Me Didier Seban, avocat de plusieurs parties civiles, interrogé par BFMTV. "Ça peut raviver un deuil et nous recommanderons aux victimes de plutôt s'extraire de la salle à ce moment-là", a expliqué Carole Damiani, présidente de l'association Paris Aide aux Victimes.
Paul-Henri Jacob de Cordemoy Baure, victime au Stade de France qui se trouvait à quelques mètres seulement d'un kamikaze, juge au contraire ces écoutes capitales."Il est important de savoir avec précision ce qui a été dit, pour qu'il y ait un maximum d'éléments au procès, estime-t-il dans un entretien à France 24. Je suis prêt à tout entendre, je veux tout savoir." Plusieurs avocats et parties civiles estiment en outre que ces enregistrements pourraient confronter les accusés à l'horreur et peut-être déclencher une prise de conscience dans le box.
Reste que les parties civiles sont peu présentes depuis le début du procès. "Le comportement d'Abdeslam sur ce procès a pu dissuader certaines victimes de venir, estime la présidente de Fenvac, Marie-Claude Desjeux. Mais il est fort probable qu'elles soient de plus en plus nombreuses à partir de la semaine prochaine car il y a des auditions très attendues. Au fur et à mesure que les victimes vont découvrir le procès et se familiariser avec, il n'est pas impossible qu'elles soient chaque jour plus nombreuses et choisissent de témoigner dans les médias. Et on verra davantage de colliers verts [réservés aux parties civiles qui acceptent de répondre aux questions des médias, NDLR] que de colliers rouges au sein de l'assistance."
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