Le ministre français de l’Intérieur, Christophe Castaner, s’est déclaré certain, mardi, que la police tenait l’auteur de l’attentat de vendredi à Lyon, une appréciation critiquée par le parquet qui rappelle que l’enquête est couverte par le secret. Jusqu’ici inconnu de la police et de la justice, l’étudiant en informatique de 24 ans de nationalité algérienne arrêté lundi est soupçonné d’avoir déposé vendredi après-midi un colis piégé contenant des boulons, des vis et des billes en métal devant une boulangerie, non loin de la gare de Lyon-Perrache.
“Il est toujours assez peu loquace” face aux policiers qui l’interrogent pendant sa garde à vue, a dit Christophe Castaner sur CNews. Mais, “à l’heure où je vous parle, je n’ai pas de doute sur le fait que nous avons actuellement en détention le responsable de cet acte qui aurait pu tuer”, a-t-il estimé. L’explosion a fait 13 blessés, dont huit femmes et une fillette de 10 ans.
Pour Christophe Castaner, l’auteur présumé de l’attentat avait “certainement” l’intention de tuer : “A l’heure qu’il est, on sait, vu ce qui a été utilisé, que nous avons évité une catastrophe”, a souligné le ministre. Le procureur de la République de Paris, Rémy Heitz, a visiblement peu apprécié de voir que le principal suspect dans son enquête était ainsi déclaré coupable par le ministre de l’Intérieur, au mépris de la présomption d’innocence.
Dans un communiqué, il “rappelle que l’enquête ouverte à la suite des faits commis à Lyon vendredi soir est couverte par le secret et qu’en application de l’article 11 du code de procédure pénale, il est le seul à pouvoir rendre publics des éléments objectifs tirés de la procédure ne comportant aucune appréciation sur le bien-fondé des charges retenues contre les personnes mises en cause”. Ironie du sort, Christophe Castaner a conseillé mardi sur CNews au maire de Lyon, Gérard Collomb, lui aussi implicitement visé par le procureur après avoir donné lundi à la presse des détails sur les investigations, de ne pas “trop parler”.
MOTIVATIONS OBSCURES
Les motivations du jeune homme, s’il se confirme qu’il est bien l’auteur de cet attentat encore non revendiqué, restent obscures. Les enquêteurs s’interrogent notamment sur la disproportion entre le procédé de mise à feu “très performant”, selon le ministre de l’Intérieur, et un volume très faible d’explosif - du TATP, explosif artisanal très instable, utilisé notamment lors des attentats de novembre 2015 à Paris.
“Il y a de vraies incohérences dans ce dossier”, a souligné Christophe Castaner. Les 330 policiers mobilisés ont retrouvé le jeune homme notamment grâce à la vidéosurveillance et aux achats qu’il a faits sur internet pour fabriquer son engin explosif. “Nous avons analysé près de 350 appels et témoignages et 30 mails qui nous ont donné des éléments”, a dit le ministre de l’Intérieur. “Nous avons analysé des heures et des heures de vidéo (...)
À partir d’achats qu’il a pu faire, il a pu être logé et interpellé.” Les trois autres personnes interpellées lundi dans le cadre de l’enquête sont ses parents et son jeune frère, lycéen. “Le profil des parents comme de ce jeune homme est un profil extrêmement classique. Les parents sont en France avec un titre de séjour régulier, bien intégrés, travaillent”, a précisé Christophe Castaner. Pour le moment, rien n’établit leur complicité. “Mais ils peuvent avoir vu et ne pas avoir dénoncé. C’est une forme de complicité aussi”, a souligné Christophe Castaner.
Quant à l’auteur présumé de l’attentat de vendredi, il était venu en France avec des visas de court séjour et avait demandé un visa étudiant pour s’inscrire dans une école, visa qu’il n’a pas obtenu. Selon une source judiciaire, il était sans activité. “Quelquefois vous avez des gens qui viennent avec des titres de séjour et qui ne repartent pas”, a admis le ministre de l’Intérieur. “L’année dernière nous avons renvoyé vers leur pays 30.000 personnes, c’est un record (...) Il nous faut sur ce sujet (...) être extrêmement vigilants et mobilisés.”
Emmanuel Jarry, édité par Simon Carraud et Yves Clarisse
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