Il y a quelques jours, ce lundi 5 mars, à Florence (Italie), un homme a été tué. Cela s'est produit en plein jour, au centre-ville, sur le pont Vespucci. Le tireur est un citoyen italien. La victime était un vendeur ambulant sénégalais. Cela rappelle la tuerie de décembre 2011, survenue (déjà) à Florence, où deux Sénégalais furent volontairement tués par un militant d'extrême-droite, pour la seule raison qu'ils étaient noirs. Cela rappelle également la fusillade de Macerata (sud de l'Italie), survenue au début du mois de février dernier, acte d'un jeune néofasciste qui s'en prit directement à un groupe de migrants. Mais dans le cas présent, nous devons nous garder de tout amalgame : il semble en effet que cette fois-ci, il n'y ait aucune motivation raciste dans le geste du tireur.
Ce lundi matin 5 mars, Roberto Pirrone, 65 ans, criblé de dettes, fatigué des disputes incessantes avec son épouse et sa famille, sort de chez lui, armé d'un pistolet, avec l'intention de se suicider. D'autres l'ont fait avant lui pour les mêmes raisons d'ordre économique, animés du même désespoir, de la même confusion et des mêmes émotions que l'on peut éprouver en pareille situation. Puis, selon ses déclarations, rapportées par les journaux et les médias, l'homme n'a plus trouvé la force de s'ôter la vie. Il a donc opté pour un "plan B" : tirer sur quelqu'un, tuer le premier qu'il croiserait sur son chemin– en épargnant les femmes et les enfants– pour finir en prison et ne plus "être un poids pour sa famille". Nous pouvons nous demander, au passage, si le fait d'avoir un proche en prison n'est pas un poids pour la famille en question, mais ceci est un autre débat.
C'est ainsi qu'à un moment donné, Roberto Pirrone voit puis croise Idy Diène sur le pont Vespucci et tire contre lui. Trois coups, dont un à la tête. Puis Pirrone s'éloigne, jette le pistolet au sol, erre dans les rues voisines et est arrêté par les forces de l'ordre sans opposer de résistance. Techniquement, il s'agit non pas d'un assassinat, qui implique un temps de préparation avant le passage à l'acte, mais d'un homicide volontaire, "prémédité"- les guillemets étant de rigueur– quelques instants seulement avant d'être commis.
Au-delà de l'absurdité d'un tel acte, une question dérangeante se pose : les "faits", tels que rapportés par la presse et donc à considérer avec la prudence qui s'impose, nous disent que Roberto Pirrone a décidé de tirer au hasard sur le premier passant venu. Et cela s'est très probablement passé ainsi. Pourtant, est-il possible qu'il ait estimé, consciemment ou inconsciemment, que la vie d'un homme noir vaille moins que celle d'un homme blanc ? Est-il possible que nous, Européens, ayons également cette perception – répétons-le, consciemment ou inconsciemment ?
Quoi qu'il en soit, la communauté sénégalaise tout entière ne peut qu'éprouver de la colère, elle qui a déjà été touchée, en 2011, par la rage assassine déversée au nom de la xénophobie et du racisme. Cette colère est compréhensible, mais nous ne pouvons tolérer les actes de vandalisme constatés durant les manifestations de protestation "organisées" à chaud par les compatriotes de la victime. L'Association des Sénégalais de Florence est bien consciente du caractère inadmissible des dégradations commises et a annoncé, ce vendredi 9 mars, qu'une collecte serait organisée afin de dédommager la ville de Florence : "Les responsables de ces actes de vandalisme ne respectent pas Florence et doivent être punis. La douleur ne justifie pas la violence, et notre peuple est un peuple pacifique". En effet, ces débordements donnent une vision faussée de la réalité : les crachats au visage du maire de Florence, Dario Nardella, en sont l'exemple parfait. En effet, à l'ère des "fake news" (informations délibérément fausses ou truquées) où les réseaux sociaux dictent leur loi, il se trouvera toujours quelqu'un pour s'empresser de dire que c'est "un immigré" qui a craché au visage du maire. Et c'est ainsi que naissent d'autres polémiques, dangereuses, car teintées de racisme rampant.
La réalité ? La réalité, c'est que les trois auteurs des insultes et des crachats tous Italiens, par ailleurs militants de mouvements d'extrême-gauche, habitués des heurts avec les autorités.
La réalité, c'est aussi cela : ces jeunes gens italiens, qui se posent en grands défenseurs des droits humains et de l'antiracisme, qui prétendent défendre et aider la communauté sénégalaise, ne font que lui causer des problèmes supplémentaires dont elle doit ensuite payer les conséquences.
S'il n'y avait qu'un seul message à faire passer suite à cette tragédie, ce serait celui que l'on peut lire sur les feuilles A4 déposées aux deux extrémités du pont Vespucci (voir photo) : "Aujourd'hui, un homme a été tué sur ce pont". Un homme, tout simplement. Mais ce jour-là, la destinée a voulu que cet homme fût Idy Diène, non seulement cousin de Samb Modou, l'un des deux Sénégalais tués à Florence en 2011, mais aussi originaire de la même commune, Mont-Rolland.
Demain, samedi 10 mars, à 15h, aura lieu à Florence une manifestation pacifique en mémoire d'Idy Diène.
Par Madeleine Rossi (traduction et adaptation de la version italienne publiée sur le blog d'information indépendant Quannomepare : https://quannomepare.blogspot.it/2018/03/omicidioponte-vespucci-dimadeleine.html
13 Commentaires
Anonyme
En Mars, 2018 (01:03 AM)Anonyme
En Mars, 2018 (01:36 AM)Anonyme
En Mars, 2018 (01:55 AM)Mais une chose est sûre. Il y'a quelque chose de bizarre dans ce récit,...
Le coupable semble s'être bien préparé.
Que lumière soit faite sur les vraies raisons de cet "assassinat"
Jo
En Mars, 2018 (04:47 AM)Anonyme
En Mars, 2018 (06:34 AM)Ex Goor
En Mars, 2018 (06:52 AM)Sotrac
En Mars, 2018 (10:03 AM)Sotrac
En Mars, 2018 (10:03 AM)Anonyme
En Mars, 2018 (10:08 AM)Anonyme
En Mars, 2018 (10:08 AM)Sotrac
En Mars, 2018 (22:03 PM)Linda Mujer
En Mars, 2018 (23:57 PM)La vie de Idy Diène ne valait guère plus que celle de cette pauvre jeune fille. Pendant ce temps, à Florence la gauche faussement antiraciste manipule , une fois n'est pas coutume, son éternelle clientèle d'immigrés nègres.
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