PARIS (Reuters) - L'onde de choc du "non" suisse aux minarets se propage en France, où l'UMP s'interroge sur la justification de ces édifices, ce que l'opposition dénonce comme une manoeuvre "électoraliste".
Interrogés par référendum, les citoyens suisses ont approuvé à une nette majorité dimanche l'interdiction de construire dans la Confédération de nouveaux minarets ornant les mosquées, prenant de court le monde politique et le gouvernement.
Le ministre français des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, s'est déclaré "un peu scandalisé" par cette "expression d'intolérance".
"Si on ne peut pas construire de minarets cela veut dire qu'on opprime une religion", a-t-il dit sur RTL.
L'ancien Premier ministre socialiste Michel Rocard a de son côté jugé que la peur était "mauvaise conseillère".
"C'est quand même un affichage de méfiance. C'est un vote de violence", a-t-il regretté sur Radio Classique.
Mais des responsables politiques français ont estimé que la France pourrait ou devrait prendre exemple sur la Suisse.
Pour le Front national, ce vote est un signal envoyé aux "élites", qui doivent "cesser de nier les aspirations et les craintes de peuples européens (face) à des signes ostentatoires que veulent imposer des groupes politico-religieux musulmans, souvent à la limite de la provocation".
Plusieurs responsables de l'UMP ont fait des commentaires qui ont été vivement critiqués à gauche. Dimanche soir, le secrétaire général du parti majoritaire, Xavier Bertrand, a jugé qu'on n'avait pas "forcément besoin" des minarets en France.
"AMALGAMES"
Le porte-parole adjoint de l'UMP, Dominique Paillé, a abondé dans son sens lundi sur France Info. Si les salles de prière sont "évidemment tout à fait indispensables", il n'en va pas de même pour les minarets, a-t-il dit.
"Il faut pouvoir assumer ses convictions sans que cela blesse qui que ce soit et sans que cela transgresse le principe de laïcité", a-t-il estimé, faisant le distinguo entre les minarets et les clochers des églises catholiques qui sont "un héritage historique souvent antérieur à la République".
En France, "il y avait des religions qui étaient avant l'avènement de la République et celles qui sont arrivées après", a-t-il fait valoir.
Jean-François Copé a refusé de commenter ces déclarations, joignant sa voix à celles de la gauche.
"Il faut reconnaître que ce vote n'aide pas, car il va encourager toutes les formes d'amalgames", a dit le président du groupe UMP à l'Assemblée nationale sur France Info.
Au Parti socialiste, Pierre Moscovici a jugé sur LCI "électoralistes" les propos de Xavier Bertrand qui, selon lui, reviennent à dire "qu'au fond les Suisses montrent la voie (...) C'est extrêmement inquiétant".
Le député socialiste européen Vincent Peillon et le secrétaire général de la CGT, Bernard Thibault, ont fait le lien entre le vote suisse et le débat lancé par Nicolas Sarkozy et la droite sur l'identité nationale en France. En Europe, "nous sommes dans un temps où, par défaut de vigilance, par confusion, par électoralisme, on commence à jouer avec des questions fondamentales", a estimé Vincent Peillon sur i>Télé. "Cessons de jouer avec des concepts, avec des émotions mauvaises et dangereuses. N'animons pas la campagne des (élections) régionales (de mars prochain) avec des sujets qui n'ont rien à voir, comme l'identité nationale", a-t-il dit.
Bernard Thibault, de son côté, a déploré qu'en période de crise "certains trouvent avantage à mettre en exergue des coupables tout désignés". "Chacun a son immigré dans son pays en Europe", a-t-il dit.
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