Paris, France (PANA) – L’attribution de la qualité de pays membre de l’Union africaine (UA) doit désormais être fondée sur les critères de démocratie, de bonne gouvernance et d’adhésion à l’idéal panafricain, a estimé samedi à Paris l’universitaire et éditeur sénégalais, Babacar Sall.
«Ce n’est pas parce qu’on est un pays africain qu’on doit pouvoir automatiquement entrer à l’Union africaine. Il faut remplir un certain nombre de conditions en fonction de la démocratie, d’une gouvernance saine et de l’adhésion à l’idéal panafricain», a dit M. Sall enseignant-chercheur à l’Ecole des hautes études en Sciences sociales (EHESS, Paris).
S’exprimant lors d’un entretien accordé à la PANA, il a estimé nécessaire « d’abord de faire coïncider le projet unioniste avec le projet démocratique ».
«Or, il n’y a pas encore de véritables pratiques démocratiques dans le continent à part quelques rares pays que l’on peut compter sur les doigts de la main», a dit l’universitaire sénégalais, assurant que l’unité du continent exige d’abord un renforcement des institutions nationales et des contre-pouvoirs.
«Sans ce préalable démocratique, assorti de conditionnalités contraignantes pour les pouvoirs, qui sont en place, il serait difficile d’opérer les réformes à des fins unitaires au niveau du continent», a souligné M. Sall.
Il a, par ailleurs, exprimé sa préoccupation au sujet du retard pris par l’Afrique «par rapport aux dynamiques du monde».
«Il faut corriger cet écart», a dit l’universitaire, critiquant le manque de vision des dirigeants africains plus portés à conserver des «îlots de souveraineté» qu’à construire une fédération d’idées et d’action.
«Le pouvoirisme, c’est-à-dire, la mobilisation de tous les moyens d’Etat à des fins de conservation exclusive du pouvoir au détriment des réformes nécessaires et du bien-être collectif, est une pratique courante sur le continent», a regretté le spécialiste de la sociologie rurale africaine.
Pour lui, il est totalement absurde qu’un «chef d’Etat africain dépense 20 milliards de CFA pour l’achat d’un avion alors que son pays manque de tout : santé, nourriture, éducation, emploi».
Traçant la feuille de route de l’unité africaine, M. Sall a plaidé que dans chaque pays l’adhésion à l’UA soit soumise à une consultation référendaire.
«C’est une question de méthode, de bon sens. J’allai dire une question de respect du suffrage et de l’avis des citoyens sans lesquels il n’y aurait pas de légitimité», a insisté M. Sall qui est, par ailleurs, Directeur de publication aux Editions l’Harmattan à Paris.
«L’absence de débat avec les peuples est une des carences majeures du projet unioniste. C’est la charrue avant les bœufs. Il faut inverser la démarche : informer, expliquer, convaincre et consulter les bases nationales», a encore dit l’universitaire sénégalais.
«Je pense qu’il faut plus de pédagogie, plus de débat au niveau national autour de ces questions et de leurs incidences sur les quotidiennetés nationales. Après, on pourra passer à une autre échelle», a-t-il conclu.
Réunis du 1er au 3 juillet à Accra, les chefs d’Etat africain ont décidé de mettre en place un comité ministériel chargé de réfléchir aux contours et aux prérogatives d’un gouvernement fédéral africain dans la perspective de la création des Etats-Unis d’Afrique. Le comité devrait soumettre son rapport à un groupe de chefs d’Etats dont le Sénégalais Abdoulaye Wade et le Sud-Africain Thabo Mbeki. Le sommet n’avait pas, rappelle-t-on, pu trancher entre la thèse de la création immédiate des Etats-Unis d’Afrique et celle de la construction de l’unité du continent par paliers en s’appuyant sur les organisations sous-régionales.
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