Le montage annoncé de combats devant de nouveau opposer "Balla Gaye 2" à "Gris Bordeaux" et "Bombardier" à "Emeu Sène", présentés comme les affiches de la saison à venir, illustre, sans doute, une crise de renouvellement de l’élite de la lutte avec frappe, discipline parvenue à la croisée des chemins en raison de la contestation de son management, des difficultés organisationnelles et de sa perte progressive d’attraction.
Ces combats sont-ils véritablement des affiches ? L’interrogation est légitime au regard des profils des protagonistes, tous de "vieux" briscards de l’arène, et du caractère déclinant de leur carrière.
Ces lutteurs s’étaient déjà opposés les saisons précédentes avec des fortunes diverses. Oumar Sakho, alias Balla Gaye 2 était venu à bout d’Ibrahima Dione dit Gris Bordeaux par décision arbitrale basée sur un nombre supérieur d’avertissements reçus par la tête de file l’écurie Fass lors de ce combat
De son côté, Mamadou Ngom dit Emeu Sène, par une victoire éclaire, avait pris le meilleur sur Serigne Dia dit Bombardier, lui ravissant, par la même occasion, son titre de Roi des Arènes.
Les combats en perspective vont ainsi mettre aux prises des "VIP", nom donné aux lutteurs parvenus au sommet de la discipline. Au bon souvenir des férus de la lutte avec frappe sevrés de spectacles depuis longtemps.
Le premier combat devrait déboucher sur la clarification d’une opposition certes spectaculaire à l’époque mais restée au travers de la gorge du vaincu non sans laisser un goût d’inachevé au vainqueur.
Pour le second, une opposition entre deux "Rois déchus", un des protagonistes, Bombardier l’a présenté comme une occasion de prendre sa revanche et de s’assurer une retraite par la grande porte.
Il sera atteint par la limite d’âge (45 ans) à l’issue de la saison prochaine. Son adversaire aura sans doute à cœur de revenir dans le jeu des combinaisons après son revers par chaos face à Modou Lô, devenu depuis Roi des Arènes.
Ces confrontations initiées par l’un des promoteurs historiques de cette discipline, Gaston Mbengue, ont le mérite de raviver les débats et les projections sur d’autres combats, mais traduisent, dans le même temps, un certain blocage.
Il y transparaît une tendance à prendre les mêmes et à recommencer. Illustration d’une certaine difficulté à faire émerger une relève à même de déchainer les passions à la hauteur de l’aura de ces "VIP".
Pendant longtemps, les acteurs s’en sont accommodés, préférant rejeter les difficultés notées dans la discipline sur le Comité national de gestion de la lutte (CNG) dirigée depuis plus de vingt-cinq années par le docteur Alioune Sarr. Cette longévité est devenue source de crispation dans certains cercles de la discipline.
D’aucuns reprochant à Sarr et à son équipe de privilégier le gain en faisant systématiquement recours à des coupes sur les cachets des lutteurs quand bien même la légèreté des lutteurs et de leurs encadreurs avec les règles établies est un secret de polichinelle.
A vrai dire, les acteurs de la lutte avec frappe pâtissent, d’une certaine manière, d’une propension à mettre en avant les intérêts particuliers. Résultat : les sponsors qui se bousculaient ont montré des réticences.
Il est aujourd’hui loin le temps où les sociétés de téléphonie et autres opérateurs transposaient leurs rivalités jusque dans les stades. Poussant désormais les promoteurs à se rabattre sur le parrainage. Une stratégie à la portée limitée dans la mesure où elle ne garantit nullement un financement viable.
Aussi, las d’attendre un hypothétique montage d’un combat pour engranger des gains financiers, certains lutteurs n’hésitent d’ailleurs plus à monnayer leur talent en entamant une carrière dans le championnat MMA.
Il en a par exemple été ainsi des lutteurs Bombardier, Sitteu et Reug Reug. Ce dernier étant pourtant considéré comme l’une des étoiles montantes de la lutte à la faveur de victoires éclatantes aux dépens de poids lourds de la lutte avec frappe.
Autre signe de la contradiction dans cette discipline, l’Arène nationale. L’infrastructure érigée à Pikine, dans la banlieue dakaroise, peine à jouer son rôle de théâtre d’attraction de cette discipline en raison de son délaissement par les promoteurs, dont la majorité préfère squatter encore les stades de football, alors que sa construction a été la concrétisation d’une doléance récurrente des acteurs depuis des décennies.
0 Commentaires
Participer à la Discussion